Le décret n° 2025-169 du 21 février 2025, récemment paru au Journal officiel, montre que la France continue de se conformer à la réglementation européenne MiCA (Markets in Crypto-Assets Regulation). Ce texte apporte des modifications significatives à la section réglementaire du code monétaire et financier. Il impose de nouvelles obligations aux fournisseurs de services sur actifs numériques (PSAN) exerçant en France.
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Un cadre resserré pour les PSAN : entre harmonisation et hausse des coûts
Le décret a principalement pour effet d’établir de nouvelles obligations financières à la responsabilité des PSAN. À partir de maintenant, les entreprises crypto devront verser une somme fixe de 10 000 euros à l’AMF. De plus, elles devront s’acquitter d’une redevance proportionnelle (0,0094 pour mille des encours) qui sera déclarée avant le 30 avril chaque année.
Par ailleurs, l’annonce d’un livre blanc sur certains actifs numériques entraîne désormais une contribution de 3 000 euros.
Pour les intervenants déjà inscrits ou autorisés, ces nouvelles obligations viennent s’ajouter à un cadre de plus en plus exigeant. Le texte a pour objectif de garantir la conformité avec le règlement MiCA. Cependant, il accentue la lourdeur administrative et financière des PSAN français. Les individus ou entreprises visant à obtenir un agrément PSAN en 2025-2026 devront inclure ces coûts additionnels dans leur plan d’affaires.
Sous le prétexte d’une harmonisation européenne, se dessine également une stratégie de financement de l’AMF destinée à soutenir l’augmentation des missions imposées par le cadre MiCA.
Un alignement avec l’Europe… mais pas sans nuances
La France ne fait pas figure d’exception : plusieurs autorités de régulation en Europe imposent des contributions comparables, voire plus élevées. L’Italie et l’Espagne ont déjà mis en place des échelles de redevances proportionnelles, tandis que l’Allemagne envisage d’instaurer des frais de contrôle modulés en fonction de la taille des opérateurs. Il semble donc que la France tire des leçons de ses voisins, ce qui consolide sa place au sein du cadre européen.
Toutefois, sur la scène internationale, notamment en comparaison avec des juridictions telles que le Royaume-Uni ou Dubaï où la fiscalité et la réglementation sont parfois considérées comme moins strictes, ce niveau de taxation pourrait dissuader certaines entreprises du Web3 qui souhaitent établir leurs opérations européennes en France. Néanmoins, ce risque est tempéré par la qualité du cadre juridique français, l’estime de l’AMF au niveau européen et la sécurisation des initiatives grâce à une supervision solide.
En définitive, l’objectif du décret est de favoriser une attractivité responsable : il ne s’agit pas de se lancer dans une compétition réglementaire pour le moins cher, mais de mettre en avant Paris comme un centre valide pour des projets conformes et institutionnels.

Des points d’attention pour les PSAN : vigilance sur le calendrier et la rédaction
D’un point de vue légal, le décret soulève plusieurs observations. D’un côté, l’application progressive de certaines mesures à partir du 1er juillet 2026 (suppression d’articles essentiels tels que D.54-10-1 ou D.54-10-7) offre aux intervenants un laps de temps pour se familiariser avec la mise en œuvre intégrale de MiCA. Cette approche permet d’éviter un impact de « big bang » réglementaire.
Toutefois, certains aspects techniques pourraient poser des questions. L’intensification de la formalisation des déclarations auprès de l’AMF, l’élimination de certaines obligations anciennes au profit de nouvelles exigences émanant du droit européen, et le manque de clarté sur certains concepts (tels que la détermination précise des « encours » soumis à la contribution proportionnelle) laisse entrevoir des zones d’incertitude qui pourraient requérir des éclaircissements futurs par le biais de la doctrine AMF ou du décret d’application.
De plus, les PSAN devront prévoir comment s’articulera ce décret avec les évolutions futures du droit européen (notamment les directives de l’ESMA) afin d’éviter des cas de double conformité.
L’ordonnance n° 2025-169 constitue un jalon crucial dans l’incorporation de la réglementation MiCA dans le droit français. Bien que le renforcement de la sécurité juridique soit incontestable, les PSAN devront adapter leurs modèles économiques et opérationnels à ces nouvelles contributions.
Ainsi, la France se place parmi les principaux régulateurs européens tout en étant vigilante afin de préserver la compétitivité de son espace crypto. Les professionnels du domaine examineront minutieusement les prochaines précisions de l’AMF et la mise en place graduelle jusqu’en 2026.
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L’article Décryptage du décret n° 2025-169 : vers une convergence franco-européenne pour les PSAN est apparu en premier sur Journal du Coin.