Un gang de ravisseurs ultraviolents, spécialisé dans les rançons en cryptomonnaie, a semé la terreur de 2023 à 2025. Après une série d’enlèvements rocambolesques, le cerveau de l’opération a été arrêté au Maroc. L’affaire, décortiquée par Le Monde dans l’article « L’ascension et la chute d’un gang de kidnappeurs spécialisé dans les rançons en cryptomonnaie », lève le voile sur le côté obscur du monde de la crypto et la sophistication des nouveaux réseaux criminels.
Ce n’est plus l’époque des malfrats au grand cœur des films des années 70, mais celle des gangs 2.0. Des criminels qui ne comptent plus les billets à la lumière d’un briquet mais traquent la fortune de leurs victimes sur la toile, souvent issues du monde de la crypto. L’article du Monde, publié par Antoine Albertini et Soren Seelow, nous plonge dans l’effrayante épopée d’un de ces gangs, responsable de plusieurs enlèvements retentissants. Leur méthode est brutale, leur organisation est millimétrée. Leur monnaie est malheureusement la crypto.
- Un gang de ravisseurs ultraviolents, spécialisé dans les rançons en cryptomonnaie, a été démantelé après avoir semé la terreur de 2023 à 2025.
- Badiss Bajjou, cerveau de l’opération, a été arrêté au Maroc, mettant fin à sa cavale de deux ans.
De la Sarthe au 14e arrondissement de Paris : le périple sanglant d’un gang crypto
Tout a commencé en août 2023, dans la campagne sarthoise. Bruno D., un retraité des postes, ouvre sa porte à ce qu’il pense être un livreur Amazon. En réalité, c’est le début d’un calvaire orchestré par un gang dont le cerveau est Badiss Bajjou, 22 ans, en cavale au Maroc. La cible ? Son fils, TeufeurS, un célèbre streamer qui a fait fortune dans les cryptomonnaies et n’hésite pas à s’en vanter sur les réseaux sociaux.
En moins de 24 heures, TeufeurS reçoit des vidéos de son père menacé. L’objectif est clair : le transfert immédiat de la totalité de son portefeuille en Ethereum. La pression est intense, et le jeune homme cède. Il transfère 1,7 million d’euros en deux versements. Si Bruno D. est libéré sain et sauf, les victimes suivantes n’auront pas cette chance.
L’ultraviolence comme levier de pression
Puis, comme le souligne l’enquête du Monde, le modus operandi des ravisseurs s’intensifie. En janvier 2025, David Balland, cofondateur de Ledger, est enlevé à son domicile. Cette fois, les menaces verbales ne suffisent plus. Pour exiger la rançon, les criminels lui amputent un doigt.
Trois mois plus tard, le 1er mai, le père d’un joueur de poker est à son tour kidnappé. L’affaire est gérée par les mêmes cerveaux. C’est l’iPhone 8 de l’un des complices, Djelloul C., qui va révéler l’étendue du plan : des listes de fournitures pour les séquestrations (haches, pinces, scies…) et un planning pour d’autres « attaques ».
Durant les 58 heures de séquestration du père du joueur de poker, Badiss Bajjou, le cerveau du gang, l’a mis sous une pression constante. Il lui a notamment envoyé un message glaçant pour le forcer à payer, le voici dans son orthographe originale :
« Je t’explique le programme chez nous à l’international.
1) Couper un doit
2) Couper deux doit
3) Percer un genou
4) Si après tout ça la personne ne paye pas on fait disparaître le cor la pièce est bâcher du sol o plafond le corps est prêt à être emballé. Ca donnera un bon exemple pour les prochain c’est tout tes pas le 1er tu sera pas le dernier. Prend le pas personnellement. »Procès verbal – Source : Le Monde
Pour faire céder le fils, le ravisseur a multiplié les menaces, lui rappelant que « l’argent se refait » mais qu’un père, on n’en a qu’un. L’horreur a atteint son paroxysme lorsque Badiss Bajjou a menacé d’enchaîner les amputations :
« Sache qu’une fois le doit coupé on enchaine tout les heures. Jusqu’à vider son sang y’a plein de doit qui vont s’enlever avant qui meurt. »
Le Maroc, la planque parfaite, et une fin de cavale inattendue
Pour rappel, le commanditaire, Badiss Bajjou, se croyait en sécurité au Maroc, d’où il pilotait ses troupes. Mais grâce à une collaboration inédite entre le ministre de l’Intérieur français, Bruno Retailleau, et son homologue marocain, et aux coordonnées GPS obtenues par la PJ parisienne, l’étau se resserre. Le 3 juin 2025, Badiss Bajjou est arrêté à Tanger, marquant la fin de deux ans de cavale pour ce jeune homme au passé déjà chargé.
« Le mode opératoire est similaire, le commanditaire est identifié et paraît impliqué dans la plupart des procédures et, pourtant, les affaires sont dispersées dans différentes juridictions. Il y a trop peu de communication entre les magistrats instructeurs, et il est difficile de verser des pièces d’un dossier à un autre, en vertu du secret de l’instruction. »
Me Romain Chilly, avocat de parties civiles dans plusieurs de ces dossiers – Source : Le Monde
Mais le démantèlement de ce réseau soulève une interrogation. Malgré des modes opératoires similaires et un commanditaire commun, les enquêtes ont été menées par différentes juridictions sans être centralisées. Un manque de communication qui, selon l’avocat Romain Chilly, pourrait ralentir la lutte contre ces nouvelles formes de criminalité. Affaire à suivre.
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