Crypto sans frontières. L’efficacité des sanctions occidentales contre la Russie est sérieusement remise en question par la récente manœuvre d’une opération de cryptomonnaie soutenue par le Kremlin. Le stablecoin A7A5, pilier du système de paiements transfrontaliers A7, aurait réussi à déplacer au moins 6 milliards de dollars depuis août 2023, en dépit des déclarations d’intention américaines. Cette prouesse numérique, révélée par le Financial Times, souligne les limites de la surveillance financière et la rapidité avec laquelle Moscou adapte son infrastructure pour maintenir ses flux économiques.
- L’opération de cryptomonnaie soutenue par le Kremlin a défié les sanctions occidentales en déplaçant 6 milliards de dollars avec le stablecoin A7A5.
- Moscou a démontré une ingéniosité inquiétante en « nettoyant » et recréant rapidement des jetons, compliquant la traçabilité des fonds et soulignant les limites de la surveillance financière actuelle.
Moscou réalise un tout de passe-passe pour contourner les sanctions internationales
L’opération pour déjouer les sanctions a été aussi rapide qu’ingénieuse, nous raconte le Financial Times. Suite à la désignation par Washington de l’émetteur de l’A7A5, Old Vector (enregistré au Kirghizistan), et de l’échange crypto Grinex en août, les administrateurs ont procédé à une « destruction et recréation » éclair des jetons.
Moins de 24 heures après, l’instruction technique « destroyBlackFunds » a été utilisée pour effacer le solde de deux portefeuilles liés à Grinex, anéantissant plus de 80 % des jetons en circulation (environ 405 millions de dollars). Immédiatement après, des jetons de valeur équivalente ont été recréés dans un nouveau portefeuille.
Cette méthode rompt ainsi le lien direct avec les anciens comptes sanctionnés. Contrairement à un simple transfert, elle rend la traçabilité des fonds considérablement plus difficile. Ce nouveau portefeuille « nettoyé », nommé TNpJj, a depuis géré des transactions totalisant 6,1 milliards de dollars, comme l’a révélé l’analyse dues équipes du Financial Times, assurant ainsi la continuité des opérations pour le réseau A7.
Le stablecoin A7A5 au cœur du système financier russe
Le succès de ce contournement repose sur une infrastructure financière solidement appuyée par Moscou. Le réseau A7 est explicitement conçu comme une alternative au système SWIFT dominé par l’Occident. Les opérateurs de l’A7A5 semblent donc avoir tiré les leçons des précédentes actions américaines, notamment en s’enregistrant au Kirghizistan, une juridiction considérée comme « amie » par Moscou.
Le soutien institutionnel est en effet crucial. La banque de défense russe sous sanctions, la Promsvyazbank (PSB), détient en effet une participation de 49 % dans le réseau A7 et garantit désormais chaque jeton A7A5 avec un rouble. Les autorités russes lui ont d’ailleurs récemment accordé le statut officiel d’actif financier numérique et le PDG de PSB a même affirmé au Président Poutine que la banque « crée un système de règlements transfrontaliers basé sur A7 ». De plus, le réseau bénéficie de prêts significatifs de la VEB, la banque d’État pour le développement, qui finance les projets prioritaires du Kremlin.
Selon le Financial Times, l’activité du portefeuille TNpJj suit les heures de bureau moscovites (avec un pic d’activité entre 10h et 12h, heure locale). Les clients peuvent même acheter ce stablecoin au 14e étage de la Tour de la Fédération à Moscou, la même adresse que l’ancien échange sanctionné Garantex, ce qui laisse donc peu de place au doute.
Le contournement réussi des sanctions par l’A7A5, facilité par une opération de nettoyage rapide et un appui étatique massif, est une victoire symbolique et pratique pour la Russie. Il démontre la résilience de son économie et sa capacité à exploiter les failles de la finance décentralisée. Pour l’Occident, cette affaire met en évidence la nécessité urgente de renforcer la surveillance de l’infrastructure crypto pour éviter que les sanctions ne deviennent de simples obstacles techniques contournables.
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